L’histoire autochtone, l’art et les planches à roulettes sont les thèmes de l’exposition intitulée Exploring Colonialism, Creativity and Reconciliation with Skateboards (exploration du colonialisme, de la créativité et de la réconciliation au moyen de planches à roulettes) organisée par les élèves de Sal’s Skate Shop, une salle de classe à la Salisbury High School à Sherwood Park qui combine l’entrepreneuriat et la culture de skate pour motiver les jeunes.
Ce projet, financé en partie par l’Aspen Foundation for Labour Education, s’inspire de l’œuvre de Micheal Langan, propriétaire et exploitant de Colonialism Skateboards en Saskatchewan. Son entreprise vise à attirer l’attention sur des aspects complexes et non dits de l’histoire et de la culture autochtones au Canada en combinant des créations artistiques sur des planches à roulettes avec des leçons d’histoire sur la culture autochtone et le colonialisme au Canada (www.colonialism.ca/). S’appuyant sur le travail de Micheal, le but du projet était de collaborer avec des créateurs et leaders autochtones de la collectivité pour créer des œuvres qui explorent les idées coloniales du passé du Canada. Le projet a vu le jour lorsque l’éducateur local Michel Blades a visité la classe pour parler du savoir autochtone. Les sujets couverts ont permis aux élèves de connaître les politiques du gouvernement du Canada qui ont eu un effet direct sur la vie des peuples autochtones, comme les traités, la Loi sur les Indiens, les écoles résidentielles et les conclusions de la Commission de vérité et de réconciliation du Canada. Comme un élève l’a si bien dit : « J’ai appris ce qu’ont vécu les enfants qui sont allés aux écoles résidentielles…. à l’intérieur de ces édifices, leur langue et de leur culture ont été complètement détruites. » Le discours de Michel a aussi habilité les élèves à diriger le projet avec confiance en leur permettant d’être des enseignantes et des enseignants et en plaçant les enseignantes et enseignants (artistes invités et leaders communautaires) dans le rôle d’apprenantes et apprenants conformément à l’approche pédagogique autochtone aux façons de savoir et de faire.
Le planchiste professionnel Joe Buffalo de Colonialism Skateboards était parmi les leaders communautaires présents. Originaire de Maskwacis et maintenant installé à Vancouver, Joe a visité la classe pour parler de la positivité que lui apporte la planche à roulettes et de comment elle lui a permis de surmonter la noirceur qu’il a vécue pendant qu’il était élève d’une école résidentielle en Alberta. Il a aussi raconté l’histoire de l’image sur sa première planche destinée aux professionnels : une planche qui rend hommage à son ancêtre, le chef des cris des Plaines Pitikwahanapiwiyin (Poundmaker). L’histoire et l’image créée par Joe démontrent comment la planche à roulettes peut être utilisée comme forme d’activisme et méthode pour provoquer des changements sociaux. Sa participation au projet l’a d’ailleurs inspiré à lancer son organisme à but non lucratif entitledNations.
Michel et Joe ayant jeté les bases, les élèves ont ensuite rencontré l’artiste résident John « JCat » Cardinal de la Première Nation Whitefish Lake. L’œuvre de John illustre le lien entre ses racines culturelles et l’utilisation de la couleur, des dessins et des animaux, mais incorpore aussi des thèmes contemporains comme le hip-hop, la mode et l’animé. Sa capacité à réunir ses deux mondes qui semblent séparés a fait de lui le mentor parfait pour les élèves – il les a aidés à trouver leur voix au moyen de la création artistique. John a travaillé harmonieusement avec les élèves et leur a transmis les habiletés et les techniques nécessaires pour donner vie aux enseignements de Michel et de Joe sur une planche à roulettes. Ces ateliers ont aussi permis à John de raconter comment il est devenu un artiste autodidacte vivant dans une réserve et comment il utilisait l’art pour s’échapper des pressions sociales négatives. Grâce à son mentorat, les élèves ont réussi à devenir des agentes et agents de sensibilisation à l’oppression et aux dommages systémiques infligés par l’intermédiaire des images sur leurs planches, leur présence dans les réseaux sociaux et l’exposition qu’ils ont organisée ensemble. L’activité a aussi permis d’établir un partenariat entre John, Joe et une nouvelle cohorte de Sal’s Skate Shop pour livrer ce projet annuellement.
Pendant plus de six semaines, les élèves ont peint leurs planches en plus de planifier l’exposition tenue à la boutique de skate Local 124 à Edmonton et d’en faire la promotion. Dix-sept planches étaient exposées illustrant des thèmes liés au colonialisme canadien, comme les écoles résidentielles et les mesures nationales qui ont mené à la disparition de milliers de femmes autochtones. Les personnes présentes à la cérémonie d’ouverture ont pu assister à une démonstration de planche à roulettes à l’intérieur par l’équipe Full Circle Skate et ont eu l’occasion de rencontrer les artistes et de savoir ce qu’ils pensaient de qu’ils avaient appris durant le projet. L’exposition a duré cinq semaines et a reçu de nombreux commentaires positifs et éloges d’autres élèves, du public et des leaders scolaires et communautaires. Selon Michel Blades, la réconciliation c’est d’abord la création de relations, et ce projet s’étendait au-delà de la salle de classe à la boutique de skate, aux réseaux sociaux et à la communauté élargie. Les dialogues qui ont eu lieu entre les membres de la communauté durant cette activité et sur les diverses plateformes électroniques témoignaient du pouvoir de la planche à roulettes et de la façon qu’elle peut être utilisée pour lancer un appel à l’action afin de forger la voie vers la décolonisation.
Kristian Basarabam, enseignante, et Joe Buffalo, planchiste professionnel, avec son modèle pour professionnels Poundmaker.